Avachie devant les Sims, entourée de ma peluche Licorne et de Pusheen the Cat, j’avais presque oublié ce phénomène. La reproduction annuelle des ornithorynques hermaphrodites (ça existe) ? Non, quelque chose de beaucoup plus courant et expérimenté à longueur de journée par les filles. Il y a même des gens qui trouvent drôle de faire des vidéos dessus ! Le harcèlement de rue.
Oui, j’avais presque oublié que quand on sort dans la rue/en boîte/au supermarché/au restaurant/etc et qu’on est une fille, il faut être préparée mentalement à subir des remarques de la part de malotrus qui parfois ne s’arrêtent pas qu’à la parole. C’est franchement désespérant. Surtout quand on s’entend dire ensuite :
– “Si souvent que ça ? C’est pas possible … vous exagérez !”
– “Oui enfin si un homme ne peut plus faire un compliment à une femme …”
-“Je suis sûre que ça n’arrive pas si fréquemment que ça quand même.”
Et bien si ! Alors moi aussi j’ajoute ma petite brique à l’édifice pour dîre que des fois, ça soule. Ah non pardon, ça soule tout le temps en fait.
Pour ma part, j’ai une gentille tête de blondinette bien niaise qui me vaut des surnoms divers et variés allant de l’elfe de Naheulbeulk au petit Chaperon Rouge.
Bon, ça va, c’est mignon.
Sauf quand ça vient d’un mec bourré que je ne connais pas dans la rue.
De plus, je suis dotée par la nature d’un don précieux : je rougis comme une tomate pour un rien. Et moi, quand on m’interpelle dans la rue, au lieu de répondre un truc bien senti, je rougis. Ce que le mec très intelligent prend soit comme un encouragement, soit comme une victoire. D’un côté je suis assortie à mon manteau comme ça.
Depuis le temps que ça dure, on pourrait penser que je ne me transforme plus en salade de crudités. Car déjà en 4ème quand les garçons nous mettaient “des mains aux fesses” je devenais plus rouge que l’habit de fêtes du Père Noël, mais 10 ans plus tard, je n’ai pas changé.
Vous allez me dire, avec mon manteau rouge, je cherche les embrouilles aussi. C’est vrai que nous les filles, parfois on a tendance à s’habiller de façon provocante au lieu de porter des vêtements convenables. Genre un sac poubelle.
J’en ai fait l’amère expérience lorsque j’avais 15 ans et que pour la première fois de ma vie j’ai vraiment eu peur. Un téléphone sans signal, perdue au milieu de la foule lors de la fête de la musique, j’ai failli me faire embarque par un groupe de jeunes qui avaient pris le message de mon t-shirt au premier degré.
Sauf que j’ai rapidement compris que tu pouvais être habillée en robe de soirée ou en sac à patate, ça ne faisait aucune différence pour des mecs qui ont décidé de te montrer qui c’est le maître (=pas toi).
Même vêtue de tshirt à l’effigie de nos poneys préférés et coiffée comme un “dessous-de-bras” (marque déposée par ma maman), il y a toujours un vieux pervers pour venir te susurrer des douceurs à l’oreille pendant que tu achètes des tampax à Auchan.
Alors, est-ce-que tout ça est anecdotique ? Non, parce que des histoires comme celles-là, nous en avons des dizaines chacune.
J’avais 15 ans, je rentrais du parc, un dimanche après-midi.
Dans une rame de RER vide, un homme alcoolisé m’oblige à m’asseoir près de lui, à manger un fruit, et veut me raccompagner chez moi. J’ai couru très vite en sortant du train.
En soirée étudiante, un mec collé à moi (berk) à qui je finis par sortir que je suis fiancée, car l’excuse “j’ai un copain” ne marche plus.
A la sortie de mon école, un homme de 45/50 ans qui me suit pendant bien 5 min. et me met super mal à l’aise.
Minuit, gare vide. J’ai eu très peur et je suis partie très vite.
En rentrant de soirée avec une copine, on dit non une première fois, mais ils nous suivent en roulant au pas et insistent lourdement pendant plusieurs -longues- minutes.
Ah je pourrais continuer longtemps … mais les histoires se ressemblent toutes. Peu importe la façon dont on est habillée, peu importe si on est accompagnée ou non, peu importe le lieu , peu importe l’heure, peu importe notre tête, peu importe notre réponse, peu importe notre envie de leur parler.
Non, ce ne sont pas des compliments. Non, ça ne nous fait pas plaisir. Non, on est pas “contente” au fond de nous. Non, quand on dit “non“, ça ne veut pas dire “insiste s’il-te-plait“, mais plutôt “lâche-moi stp“. Non quand on lance un regard de tueur, ça ne veut pas dire “oh oui quel séducteur tu es” .
Bref, y en a marre, alors n’oublions plus.